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Ma nouvelle Maryline trompe la mort

Publié le 28/10/2016 dans Art.

Voilà une nouvelle écrite en octobre 2015. Elle se présente sous une forme mi-roman, mi-théâtre, afin de prendre du plaisir à jouer les scènes. Alors, amusez-vous bien et bonne lecture.

Maryline trompe la mort

Elle roulait à fond la caisse. Décapotable aux pare-chocs chromés plus toute neuve. La mort entre ses lèvres aussi rouges que la carrosserie, le teint blafard et les yeux humides – facteur du vent et de la fumée nocive exhalée –, elle honorait le bitume. Ses longs cheveux noirs pogotaient en transe sur le dancefloor qu’était sa face. Rien ne pouvait l’arrêter. Un semblant de liberté au pays des fêlés.


7 h 30. Bien trop tôt. Maryline se leva et s’habilla et courut dans tous les sens, sans raison. Car oui, c’était samedi, son premier jour de repos hebdomadaire. Ses mains tremblaient, renversèrent. Elle pleura. Pourtant, elle ne retournait travailler qu’après-demain. Elle ramassa alors deux cachets au lieu d’un en guise de petit déjeuner et remit les autres dans leur boîte. Elle sortit. Une place la réclamait dans une salle à la fois d’attente et de contamination. Une matinée de plus perdue chez le médecin.

Dr Vergongheon

Que vous arrive-t-il cette semaine, ma chère Maryline ?

Maryline

La nouvelle maîtresse. Sans arrêt encore, elle a hurlé sur pratiquement tous les petits de la classe.

Maryline se leva pour prendre une posture de bonne femme fière, c’est-à-dire penchée vers le bureau du docteur, une main sur la hanche et l’autre battant le vide pour intimider sérieusement le spectateur. Le but étant d’être bien certaine que les prochains sons provenant de sa glotte pénétreraient bien la cervelle de sa victime. Elle inspira alors fortement.

Maryline

hurlant

Vous êtes un bon à rien, mon petit Théodore. Vous finirez sous les ponts si vous ne parvenez même pas à écrire votre prénom sans fautes ! prenant appui sur son autre jambe, alternant la position de ses bras Et vous, Myrtha ! Allez au tableau pour voir si vous valez mieux que Théodore ! retrouvant une posture bien droite Je demande le silence ! Allez, vous avez gagné ! Pas de récréation ! s’égosillant Sileeence !

D’abord surpris, le médecin avait exhibé anormalement ses globes oculaires. Il s’était ensuite levé à son tour pour poser une main compatissante sur l’épaule de Maryline, afin qu’elle cesse sa représentation. Il n’en savait rien, mais elle méritait aisément un prix pour sa fidèle performance. Cette démonstration indiquait au praticien tout de même deux choses corrélées. Maryline ne supportait vraiment pas cette forme d’enseignement méprisant et démotivant – elle n’avait pas tort –, et elle devait beaucoup aimer les enfants pour se sentir angoissée à ce point.

Maryline

épuisée

J’en peux plus docteur. Je suis à bout. Je ne la supporte plus. J’angoisse d’y retourner lundi. Il me faut quelque chose, docteur.


Le médecin réfléchissait. Il ne prenait aucune consultation à la légère et il en était de même pour ses réponses. Cela allait de soi.

Dr Vergongheon

Je pense qu’il vous faut du repos. On pourrait…

Maryline

Mais docteur, vous plaisantez. Je ne vais pas laisser les petits de six ans seuls avec cette cinglée de maîtresse ! Qui prendrait leur défense ? Jamais je ne pourrais les livrer à eux-mêmes. Pas tant qu’ils sont dans mon école ! Et surtout pas tant que cette odieuse madame Bonpoint y pointera le moindre orteil ! Il me faut juste une ordonnance.


Le docteur Vergongheon pensait aux derniers mots de sa patiente. Il ne pouvait bien sûr pas lui prescrire à nouveau des calmants, d’autant plus qu’elle ne respectait pas les doses et que cela s’avérait être dangereux pour sa santé. Il n’était pas de nature très bavarde et Maryline espérait qu’il la comprenne. Malheureusement, il n’en était rien.

Dr Vergongheon

De la dépendance, Maryline ?

Le rouge monta à la tête de Maryline. Et, inéluctablement, sa colère explosa.

Maryline

Ça se voit que pour vous c’est la putain de belle vie. Vous êtes comme cette salope de maîtresse : pété de tunes, chouette bagnole et fauteuil à 10 000 balles. Ça va ? Vous êtes bien installé pendant que je me torture le cul sur la paille de ma chaise à moitié déglinguée ! « De la dépendance, Maryline ? » L’autre.

Dr Vergongheon

Que… Comment…

Le docteur s’était raidi dans son siège onéreux. De tels propos l’avaient sonnés. De quoi le faire parler encore moins à l’avenir. Il n’aimait pas toujours son impassibilité, mais il se haïrait s’il objectait et mettait dehors Maryline. Et puis, celle-ci empoignait déjà la porte de sortie.

Maryline

Laissez tomber docteur, je vais me procurer un truc plus naturel que ce que vous ne voulez pas me donner.

Maryline avait sa petite idée. Elle accompagnait toujours les enfants à la grille de l’école – seule chose qu’elle aimait encore faire –, midi et soir, pour les remettre à leurs parents. En effet, l’emmerdeuse de service n’était plus dans ses pattes à ces moments-là. Et, elle avait entendu parler d’un dealer par deux papas peu discrets. Elle bénéficiait d’assez de détails pour le rencontrer. Ce qu’elle fit le lendemain même, dans l’unique bar du village.


Dr Kingshit

discret, voire paranoïaque

Chut ma belle. Tu m’as jamais vu, tu m’as jamais parlé. File-moi la tune maintenant. C’est cent.

Maryline

Sans quoi ?

Dr Kingshit

Cent. frottant son index contre son pouce, sous le comptoir T’as pas l’habitude toi… Tu verras c’est d’la bonne ma poule. Tu peux même la chiquer, comme du tabac t’sais, ça déchire plus… Culture perso dans ma piaule celle-là. T’as l’air d’en avoir besoin !

Maryline en avait besoin. Le lendemain, sortie scolaire. 8 heures non-stop avec vous savez qui. Elle se réservait son petit sachet pour cette occasion. Le fait de savoir qu’il lui tiendrait compagnie la réconfortait. Elle avait même pris des feuilles à rouler chez la buraliste. Elle espérait planer suffisamment pour ne pas subir l’ennemi, mais pas trop non plus pour éviter que cela se remarque. Il était certain qu’en tous les cas, elle ne voulait pas effrayer les enfants.


Le bus jaune du village était en avance. Les enfants montaient à bord, excités comme des électrons bouffants des photons. La maîtresse, peu encline à supporter le vacarme durant une bonne heure de trajet, s’avança vers l’oreille de Maryline.

Mme Bonpoint

Je vous les confie. Vous risquez encore de me rouspéter si je joue la méchante de service, ma petite Maryline.

Elle avait une voix mielleuse, dotée d’une pointe de sarcasme écœurant. Maryline la détestait. Madame Bonpoint se dirigeait vers sa Pontiac Firebird de 1968. Elle comptait les suivre, avait-elle annoncé. D’un côté, cela arrangeait Maryline, mais d’un autre, elle pensait : « Payée à rien foutre, putain ! ».


Pas le droit à l’herbe dans le bus – ou ailleurs –, qu’à cela ne tienne, ça se mâchait aussi ! Maryline passa discrètement sa main dans sa poche et fit mine de bâiller pour faire entrer dans sa bouche une bonne poignée de feuilles broyées. Une douce odeur d’humus s’en dégagea. Elle n’avait pratiquement aucune idée des effets que cela pouvait lui procurer, mais ça n’avait pas l’air bien méchant ; c’était 100 % bio après tout. Elle ne se doutait absolument pas que le succès de KingShit lui venait du fait que la recette ne contenait pas uniquement un amalgame de plantes. En fine quantité, mais suffisante – on ne sait pas trop à quoi –, il paraissait qu’un ingénieux saupoudrage de champignons hallucinogènes la composait. Un véritable chef 5 étoiles ce roi du shit ! Enfin, moi, narratrice, je dis ça, mais ce n’était que la rumeur qui se répandait dans les parages.


Un gamin tout mignon

secouant le bras de Maryline

Eh Maryline, Maryline. Tu me donnes un chewing-gum. S’iiiil te plaîîîît.

Maryline

souriante malgré sa bouche pleine

C’était mon dernier.

Il fallait s’en douter. Maryline mâchait sa mixture comme les vaches qui défilaient sous ses yeux et cela attisait sérieusement la curiosité, surtout que ce chewing-gum ne sentait pas comme les autres. Le garçon faisait le clown devant ses amis en imitant la ruminante Maryline, les dents vertes en moins. Résultat : les vingt-deux enfants voulaient y goûter.

Maryline

gênée

Non. Mais non ! Je vous dis que je n’en ai plus. Laissez-moi tranquille ou je le dirais à la maîtresse. Vous savez, la maî-tresse.

Une belle menace pour les petits. Bien sûr, relater ce chahut à l’institutrice était inenvisageable pour cette chère Maryline.

L’herbe asséchait sa cavité buccale. Elle se posait des questions comme « Ça se crache ou ça s’avale quand c’est fini ? », « Est-ce fini d’ailleurs ? Ça n’a plus tellement bon goût. » La déception l’assommait plus que le produit sus-cité pour le moment. Elle se sentait stupide de n’avoir osé demander aucune précision au dealer. Si elle crachait, elle s’en mettrait probablement plein la main, puis plein la poche et ce serait à la fois désagréable et imprudent (oui, elle aurait pu penser à prendre un mouchoir). En revanche, si elle avalait, cela pourrait indiquer qu’il ne s’agissait pas d’un chewing-gum. Elle méditait à cela, tandis que les enfants commençaient à faire moins de bruit et à se détourner d’elle. La maman accompagnatrice vint s’asseoir sur la banquette à demi occupée par l’héroïne pour lui parler.

Mme Pouleta

Dites donc, vous savez y faire, vous, avec les enfants. Moi je n’en ai que deux, mais y a pas moyen de les tenir en place ces garnements !

Maryline

Dites « maîtresse » et vous êtes sauvée pour pas moins de trente minutes !

Mme Pouleta

J’en prends note. Comment vous faisiez avant l’arrivée de cette pimbêche, ma pauvre ?

Maryline

bien plus calmement qu’à son habitude

J’écoutais les enfants. Je les écoute toujours, mais comme ils ne peuvent plus dire un mot en classe, sauf quand elle le leur ordonne, y a un moment où ils ont besoin de compenser. Normal… Y a rien de plus important que d’écouter les petits, pour qu’ils soient cooools.

Ça y était. Maryline planait. Elle avait malencontreusement avalé la boule lors de sa première réplique. Elle se sentait plus légère, plus fleurie qu’un bouquet de fleurs. Madame Pouleta avait bien remarqué que quelque chose clochait, mais elle reportait cette attitude sur le compte de la fatigue. Beaucoup de villageois savaient que Maryline souffrait de dépression ces derniers temps. Personne ne lui était venu en aide pour autant, y compris le docteur Vergongheon. Madame Bonpoint n’était pas la bienvenue. Les gens la trouvaient hautaine. Ils avaient bien compris qu’elle se sentait supérieure, qu’elle pensait ne rien avoir en commun avec eux. Elle n’était même pas capable de remplir toutes ses fonctions : être simplement dans le bus ou amener les enfants à la sortie de l’école. « Une belle saloperie » comme dirait Maryline.


Madame Bonpoint frimait sur le parking. D’une pression du doigt sur un petit bouton, la capote automatique qu’elle avait fait installer fermait l’habitacle avec délicatesse. Elle regardait le mouvement tout en admirant cette imitation cuir qu’elle avait, je la cite, « payée la peau des fesses chez un garagiste de renom ». Certains crieraient « Sacrilège » au fait de dénaturer une telle merveille automobile. Maryline abandonna le groupe pour la rejoindre ; preuve que plus rien n’allait bien pour elle qui habituellement la fuyait. Elle semblait déchirée à souhait et se tenait aux côtés de l’enseignante.

Maryline

tapotant le capot de l’automobile

Un bon point pour vous madame Bonpoint ! Ça c’est d’la bagnole ou je m’y connais pas.

Madame Bonpoint suivait des yeux la main de Maryline. Elle s’inquiétait pour la carrosserie encore chaude de l’engin.

Mme Bonpoint

Mais qu’est-ce qui vous arrive ma chère, enfin ! N’y touchez pas. Vous allez érafler la peinture avec vos fausses bagues !

Maryline

Oh, oh, oh. Au moins, moi, mes bagues à moi, on me les offre. Parce que y a plein de monde qui m’aime.

Mme Bonpoint

Oui, des petits morveux qui font des anneaux avec tout ce qu’ils trouvent. Mais dites-moi, vous êtes droguée, c’est ça ?

Maryline

Noooon, c’est du médicament pour voir aut’chose qu’vot’vilaine trombine.

Maryline n’enchaînait plus bien les mots. Elle frotta la paume de sa main sur la cime de cette si petite madame Bonpoint – la laque dans ses cheveux lui donnait l’impression de caresser du sapin. C’était certain, elle en avait eu pour son argent. Elle était on ne peut plus perchée et cela se ressentait. Cela s’entendait aussi. Des oiseaux quittèrent leurs branches, un renard déguerpit, un lapin bondit dans son terrier, des enfants se turent. Son euphorie effrayait la faune entière. Ses rires et autres gloussements cessèrent subitement lorsqu’elle s’écroula dans la prairie verdoyante. Son visage de craie symbolisait sa mort, mais il n’en était rien. Le calme était revenu. Rideau.


Si la rumeur racontait que le dénommé KingShit donnait à manger des champignons à Mary Jane, c’était qu’au commencement, un fortuit événement avait eu lieu. Des parasites avaient investi le chanvre. Cela s’était fait un peu à la manière des sciarides – aussi appelées mouches de terreau – qui adorent s’infiltrer dans les endroits humides et sombres tels ces placards où l’on cultive le cannabis, par exemple. Mais si la moindre maladie connue avait atteint les plants du dealer, celui-ci l’aurait décelée. Il était devenu expert en la matière et avait la main verte. Du moins, pour ce dernier point, c’était ce qu’il croyait, vu que la verdure poussait un peu plus vite que la normale. Il faut savoir également que, malgré sa façon d’être, il préférait le business à la drogue elle-même. Raisonnable, il ne se faisait qu’un petit spliff après chaque récolte, histoire de goûter la marchandise.


L’an passé, X, un client de KingShit, avait eu de franches hallucinations. Il avait gagné un stupide pari lancé par le plus idiot de ses amis en sortant de la discothèque.

Pide Amistu

Je te passe les clefs du Bakemono si tu avales ce que t’as dans la bouche.

X déglutit sans grimacer. Il proposa sa luette à la vue d’Amistu pour valider sa victoire.

X

Trop cool ! À moi le pick-up !

Ils étaient quatre à bord. X se sentait bien. Les filles à l’arrière et Amistu à la place du co-pilote avaient mis leur ceinture. Il faut dire que X ne détenait pas de papier rose. Son ami n’avait pas pensé un seul instant que son pote avalerait cette chose au goût plus que douteux, après deux bonnes heures de mastication. X tourna la clef, le monstrueux moteur hennissait bruyamment. Beaucoup de chevaux s’excitaient sous le capot ! Il avait déjà conduit le tracteur de son père dans les champs et un peu sur la route, entre deux champs. C’était kif-kif pour lui, bien qu’il ne connaissait pas le code pour circuler convenablement et que le village se situait à quarante-cinq minutes de cette ville.

L’une des filles

Eh Amistu. Pourquoi tu l’appelles Bakemono, ton taco ?

X

hilare

Taco, taco, Bakemono le taco !


Onze minutes et des secondes étaient passées. X ne roulait pas très droit et ça empirait. Aussi, tout le monde s’accrochait à ce qu’il pouvait dans ce cercueil sur roues. Amistu voulait conduire. X n’écoutait plus rien d’autre que son propre rire. On pouvait l’entendre bafouiller qu’il n’y était pour rien s’ils n’étaient pas fichus de faire une route bien droite dans ce pays ; que ceux qui avaient coulé le goudron devaient s’être saoulés jusqu’à la moelle ; que de toute façon, tous ceux qui traçaient des routes étaient des soiffards et qu’Amistu aurait dû rester au Japon parce que là-bas, au moins, l’asphalte ressemblait à quelque chose. Bref, X n’était plus raisonnable. Il passa de 74 km/h à aucun en à peine quatre secondes. Le bolide se tenait, pneus fumants, en travers des deux étroites voies d’un chemin menant à leur campagne à tous.


X

sérieux, le regard délétère

Descendez !

Pide Amistu, qui portait bien son nom1, ne chercha pas à s’opposer. X n’habitait plus X. Les trois malheureux êtres rejoignaient le bas côté, tandis que X pratiquait un laborieux quart de tour avant de rapidement disparaître dans la nuit la plus noire. Il n’en revint jamais. Le lendemain matin, les rumeurs sur l’herbe de KingShit circulaient déjà. Cela se passe très vite dans les petits villages. D’autres cas de démence – pour le coup méconnus des habitants du coin – s’étaient produits après celui-ci, avec de soi-disant « cookies magiques » que KingShit avait concoctés pour ses frères, presque au bout du pays.


Madame Bonpoint faisait une démonstration d’autorité aux petits. Cette dernière avait annoncé que Maryline s’était endormie suite à la prise de ses médicaments. Ces paroles avaient rassuré tout le groupe. La maman, aidée de la conductrice, l’avait placée, non sans peine, sur la grande assise au fond du bus.

Maryline se redressa, le regard absent, un fin filet de bave présent sur la joue. Elle passa une main dans sa poche. Elle y trouva bien sûr la cause de son état, son paquet de feuilles semi-opaques, mais aussi, sans surprise apparente, une petite télécommande permettant d’ouvrir la portière, de défaire le toit amovible et de démarrer la charmante automobile de la maîtresse. En fait, elle avait feint de s’évanouir uniquement dans le but de subtiliser l’objet. La salive qu’elle balaya d’un revers de manche faisait également partie de la mise en scène.


Elle roulait à fond la caisse. Décapotable, mort entre les lèvres, dancefloor et pays de fous… Direction la casse !


À la casse, quelque chose se préparait. X était là. Bakemono aussi, sous une autre apparence, ainsi que les trois membres de la famille de KingShit. Il s’agissait d’un ancien cimetière pour automobiles, déserté depuis bien longtemps, mais il avait de toute évidence repris du service. Personne n’avait été mis au courant. Maryline laissa tomber son joint sur le ciment. Elle se dirigeait vers le petit bâtiment où se trouvaient de nombreux outils. Elle en sortit avec un chariot plein qu’elle amena aux côtés de la décapotable. Elle répandait des pièces autour d’elle durant quelques heures, puis, pendant que le soleil embrassait goulûment le lointain paysage, elle brandit devant lui les précieuses entrailles mécaniques destinées à un projet dépassant l’entendement. Alors, soudainement, un bras articulé, gigantesque, fit trembler le sol pour s’emparer du cœur suintant et de tous les autres organes du véhicule. Une colline de carcasses désossées, mais clairement disposées d’une façon réfléchie, s’éleva à deux lieues dans les cieux, tandis qu’au sommet brillait X.


L’horizon finit par engloutir tout rayon ;
L’imposante montagne grondait, malmenait
X qui tomba, sans grâce, désoxygéné;
L’esprit à jamais souillé par la possession.

Le mont se fissurait sous d’innombrables spasmes,
Pour voir apparaître le gosier d’un volcan,
Béant au sommet du Monde, terrifiant;
Illusion d’un géant qui tousse; un fantasme.

Ô Maryline, ta fin sous moultes carcasses;
Le ciel pleurait du métal par-delà la casse;
Tranchée ou déchiquetée ; feu la rédemption.

Et, suite à son effroyable tourment, la Terre
Exhala son âme, lors de l’assomption
D’un auguste appareil parcourant l’univers.

Fin